À peine nous sommes-nous mis en route qu'un visiteur s'annonce au détour du chemin, venant à notre rencontre. C'est Réza, sa hache sur l'épaule. Il nous fait signe et presse le pas.
"Salut Mario. Lu... Ça va ?"
Ces yeux !
"Salut" répond Mario en baissant les siens. "Tu venais me voir, là ?
- Oui. Vous allez à l'Épicerie ?
- Oui oui. Tu viens avec nous ?
- Pas de refus... J'ai fait pratiquement tout le trajet d'une traite. Non, laisse, ma Lulu, je vais monter derrière.
- Non, c'est bon, j'y vais.
- Comme tu voudras, alors. Merci.
- T'as faim ? On a du pain et du fromage si tu veux... Et de la bière.
- Je vais manger un peu d'abord, alors."
Il ouvre son couteau et se taille une grosse tranche de pain, tandis que je défais le balluchon qui contient la tome de brebis.
"Tu voulais me voir. C'est pour du bois ?
- Ouais, de l'épicéa, surtout, comme d'habitude."
Réza voue une haine personnelle aux résineux. En tout cas à ces milliers d'épicéas et de pins de Douglas dont une politique de reboisement irresponsable avait un jour peuplé le Plateau. Les pins acidifient le sol et rendent presque impossible de faire pousser quoi que ce soit d'autre, même après les avoir abattus. Depuis des années, Réza s'emploie à cette tâche ardue : reformer la couche d'humus, revivifier la terre. Pour un bûcheron, il plante beaucoup plus d'arbres qu'il n'en abat.
"Et la hache, c'est pourquoi ?
- Les Cavaliers. Ils m'ont menacé."
"Réza vouE une haine personnelle aux résineux.", non ?
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